Faut-il « démondialiser » le monde pour ne pas être tenté de le diaboliser?

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© IRIN

Adnan Nevic… Qui se souvient de lui ? Et d’ailleurs, comment se porte-il ? Adnan Nevic, c’est ce bébé né en 1999 à Sarajevo et qui a été symboliquement choisi par l’ONU pour marquer le pallier atteint des 6 milliards d’êtres humains. Signe des temps ? Les Nations unies se sont bien gardées le 31 octobre 2011 de désigner un « gagnant »…

Le pallier des 7 milliards d’individus franchi ce jour-là n’a donc pas de visage… Pas de visage mais une couleur de peau. Noire. Le cap du milliard d’Africains a été dépassé en 2009 et le deuxième milliard sera allègrement franchi, malgré le sida, d’ici 2044. L’Afrique subsaharienne serait – selon les Nations unies, la seule partie du monde où la population doublerait, voire triplerait au cours des quatre prochaines décennies. Le taux de croissance démographique de l’Afrique est de 2,3% par an, plus du double qu’en Asie. Le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) prévoit que la population mondiale va continuer de progresser pour atteindre 9,3 milliards en 2050 et plus de 10 milliards d’ici la fin du siècle. Autre donnée importante : l’Inde sera d’ici 2025 le plus pays peuplé de la planète, devant la Chine, avec près de 1,5 milliard d’habitants.

Vertige des chiffres. La planète pourra-t-elle nous supporter encore longtemps ? N’a-t-elle pas commencé à donner des signes de rejet de l’espèce humaine en se laissant réchauffer plus que de raison ? Réchauffement climatique, sécheresse, guerres plus ou moins larvées, avec leurs flots de déplacés et réfugiés… Terre craquelée, fendue, sans vie. Les générations futures se souviendront-elles de nos défis lancés, ceux du Millénaire : la santé pour tous en 2015, un monde sans faim, etc. ?

Le Nord aussi, s’appauvrit. Durablement frappé par de fortes inégalités dans les domaines de l’alimentation, de la santé et de l’éducation. Le temps des révoltes urbaines. « L’urgence est aussi ici dorénavant »,écrit en substance Jérôme Larché dans son éditorial (Grotius International, édition novembre 2011). Suffira-t-il de s’indigner ? Une élection présidentielle fera-t-elle le bonheur des peuples ? Ou un G20 ? Faut-il « démondialiser » le monde… pour accepter de partager ici et avec là-bas ?  Démondialiser le monde pour ne pas être tenté de le diaboliser à force de trop le subir ?

Le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon ne disait guère autre chose dans une lettre adressée aux dirigeants du G20, qui devaient se retrouver à Cannes : « La réunion du G20 se déroule dans un contexte dramatique. La force grandissante des protestations de l’opinion publique est l’expression populaire d’un fait évident : l’incertitude économique grandissante, la volatilité des marchés et l’inégalité croissante ont atteint un point de crise (…). Partout, les gens ont perdu confiance dans les gouvernements et les institutions publiques (…). Ceux qui sont le moins responsables de cette tourmente sont ceux qui en payent le prix le plus élevé (…). Les décisions prises aujourd’hui façonneront le monde de demain (…). Sept milliards de personnes ont besoin de nourriture. D’énergie. D’offres intéressantes en matière d’emplois et d’éducation. De droits et de liberté. La liberté d’expression. La liberté de pouvoir élever ses enfants en paix et dans la sécurité. Tout ce que chacun souhaite pour soi, multiplié par 7 milliards. Ce n’est pas une simple affaire de chiffre. C’est une histoire humaine. »

Qui commence, ici, au coin de notre rue…

 

 

 

Jean-Jacques Louarn

Jean-Jacques Louarn

Jean-Jacques Louarn est journaliste à RFI.