Rapport 2013 sur les catastrophes dans le monde

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L’édition 2013 du Rapport sur les catastrophes dans le monde s’intéresse aux technologies et à l’avenir de l’intervention humanitaire. Rédigé par une quarantaine d’humanitaires et d’universitaires, le rapport souligne que ce sont les populations locales qui sauvent le plus de vies pendant les premières heures, décisives, qui suivent le déclenchement d’une crise. Pourtant, nombre de ces « premiers intervenants » n’ont pas accès à des informations et des outils de base vitaux, tels que les systèmes d’alerte précoce, une connectivité de base et une infrastructure de réseau.

Introduction de Bekele Geleta,
Secrétaire général de
 la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge
et du Croissant-Rouge

On trouvera dans ce rapport des exemples impressionnants de cas dans lesquels les technologies contribuent déjà à l’action humanitaire, avec souvent pour effet de propulser les populations touchées au coeur de cette action et d’en faire des participants engagés et non plus seulement des témoins ou des bénéficiaires de l’aide.

En Syrie, par exemple, des outils numériques de collecte de données ont été adaptés et servent maintenant à suivre le cheminement des marchandises, leur transport, leur livraison et leur distribution par des partenaires locaux dans des zones qui restent inaccessibles pour les organisations humanitaires internationales. Ce système améliore l’efficacité et la reddition des comptes et aide à distribuer des secours de première nécessité.

Aux Philippines, le gouvernement a utilisé les médias sociaux pour aider les populations à se préparer à affronter le typhon Pablo. Il a créé des pages d’information accessibles depuis les téléphones mobiles pour aider les gens à trouver l’abri le plus proche et d’autres formes d’aide. Il a aussi créé un hashtag sur Twitter pour la tempête, #PabloPH, et encouragé la population à l’utiliser. Les tweets en provenance de la population ont été par la suite cartographiés pour fournir au Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA) des informations qui lui ont permis de faire une première évaluation des dégâts.

La technologie joue aussi un rôle central dans l’amélioration des systèmes d’alerte rapide, qu’il s’agisse du Programme alimentaire mondial qui se sert des messages courts (SMS) de téléphones mobiles pour suivre les prix des produits alimentaires sur le marché, ou de l’Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture qui perfectionne ainsi ses systèmes de prévision et de surveillance de la sécheresse pour l’Afrique subsaharienne.

Cependant, à mesure que les technologies trouvent de nouvelles applications et que celles-ci se répandent chez les humanitaires, les risques qu’elles présentent, leurs limites et leurs défaillances apparaissent aussi plus nettement. À cet égard, le Rapport sur les catastrophes dans le monde donne un point de vue mesuré, qui oscille entre optimisme et prudence et insiste sur la nécessité de poser des principes directeurs et de soumettre à des tests et à une évaluation plus rigoureux des solutions imaginées, pour la plupart, par des acteurs non humanitaires.

Certains des principaux défis viennent de l’inégalité d’accès, tant des populations touchées que des humanitaires, aux technologies. Des statistiques mondiales et même régionales impressionnantes concernant l’usage des téléphones mobiles par exemple (6,8 milliards d’abonnés en 2013 et une croissance de plus de 10 %), masquent de fortes disparités à l’intérieur des États et entre eux. Ceux qui ont le plus difficilement accès aux technologies – les pauvres, les personnes sans instruction, les femmes – sont aussi les plus vulnérables aux catastrophes.

De même, les organisations locales et même les gouvernements des pays pauvres, qui seront très probablement les premiers intervenants en cas de catastrophe, sont aussi ceux qui ont le moins de chances de pouvoir mettre à profit les technologies. Pour les organisations, la faute en est non seulement aux moyens financiers et humains limités dont elles disposent mais aussi au fait que leur accès-même à l’information, provenant de l’imagerie satellitaire par exemple, est restreint. Cela risque d’avoir une incidence sur l’équilibre des forces entre les acteurs ou sur leur accès aux fonds.

Une autre limite structurelle tient au débit limité et/ou à la cherté des communications et il faudra de meilleurs partenariats public-privé pour que les opérateurs de téléphonie mobile et les fournisseurs d’accès à l’Internet puissent garantir des services minimaux.

Malgré ces défis, la technologie utilisée de manière responsable dans l’action humanitaire offre des moyens concrets d’améliorer l’efficacité et la transparence de l’aide apportée, de réduire la vulnérabilité et de renforcer la résilience. L’apprentissage à distance et l’éducation en ligne illustrent bien l’usage productif qui peut en être fait. Le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge travaille dans ce domaine depuis de nombreuses années. Il est regrettable cependant que la plupart des innovations technologiques doivent encore être testées et appliquées progressivement à plus grande échelle pour prouver leur utilité aux humanitaires.

Ce qui importe, ce n’est pas la technologie, mais la manière de l’utiliser. En revanche, les populations touchées adoptent rapidement les médias sociaux et d’autres technologies. Cette tendance a peu de chances de changer et les humanitaires doivent s’y adapter – et même y adhérer – sachant que l’accès à la communication et à l’information est un besoin fondamental et une priorité, au même titre que la recherche des personnes et le sauvetage, la protection, la santé, la nourriture, l’eau ou le logement.

Le Rapport sur les catastrophes dans le monde 2005 le reconnaissait déjà il y a près de dix ans. C’est encore plus vrai aujourd’hui.

Sommaire 
1. Les technologies de l’humanitaire
2. Technologie et action humanitaire centrée sur les communautés
3. Renforcer l’information humanitaire: le rôle de la technologie
4. Technologie et efficacité de l’action humanitaire
5. Les risques de l’innovation technologique
6. Normes humanitaires et utilisation de l’information
7. Innovation, évaluation et diffusion des technologies humanitaires

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La rédaction de Grotius International.

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